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16/10/2012

Anatole France : La rôtisserie de la reine Pédauque

France Livre Pédauque 629613291.jpgAnatole France (1844-1924) de son vrai nom Anatole François Thibault, doit son pseudonyme au métier de son père, libraire, qui tenait une boutique appelée « Librairie de France », à ses débuts d’écrivain il signera France-Thibault avant d’opter définitivement pour Anatole France. Dès l’enfance il vivra au milieu des livres.  

C’est en 1893 que paraît La rôtisserie de la reine Pédauque, l’un de ses romans les plus aboutis qui lui vaudra d’être considéré comme un nouveau Voltaire. Le roman se déroule au XVIII siècle et est écrit dans le style de l’époque. Un jeune garçon employé dans la rôtisserie de son père est pris sous la protection de l’abbé Coignard - « mon bon maître » - qui se chargera de l’instruire en latin et en grec car il devine sous l’apprenti un potentiel intellectuel. Roman initiatique, le jeune homme va croiser des personnages truculents, des prêtres qui ne crachent pas sur la bouteille ou un frais minois, des jeunes femmes particulièrement rouées, un vieux fou alchimiste à ses heures qui le mettra en garde contre les Salamandres « ce sont des créatures infiniment aimables et belles. Il nous est possible et convenable de former avec elles des unions dont les délices ne se peuvent concevoir. » Le jeune croisera l’amour et la jalousie avant qu’au bout de toutes ces aventures il ne retourne auprès de ses parents et ne s‘établisse comme libraire.

J’ai lu ce roman avec délice et jubilation, tant le rythme est enlevé, le ton d’époque très réussi et les piques assassines sur le clergé sous couvert de réflexions anodines particulièrement drôles. Un excellent livre à lire et relire, un classique.     

 

« Je descendis en chemise à l’office et tirai d’une certaine armoire, dont la veille je m’étais prudemment assuré la clef, une bouteille que je vidai avec plaisir. Après quoi, remontant l’escalier, je rencontrai entre les deuxième et troisième étages une petite demoiselle en pierrot, qui descendait les degrés. Elle parut très effrayée et s’enfuit au fond du corridor. Je la poursuivis, je la rejoignis, je la saisis dans mes bras et je l’embrassai par soudaine et irrésistible sympathie. Ne m’en blâmez point, mon fils ; vous en eussiez fait tout autant à ma place, et peut-être davantage. C’est une jolie fille, elle ressemble à la chambrière de la baillive, avec plus de vivacité dans le regard. Elle n’osait crier. Elle me soufflait à l’oreille : « Laissez-moi, laissez-moi, vous êtes fou ! » Voyez, Tournebroche, je porte encore au poignet les marques de ses ongles. Que n’ai-je gardé aussi vive sur mes lèvres l’impression du baiser qu’elle me donna !

— Quoi, monsieur l’abbé, m’écriai-je, elle vous donna un baiser ? »

 

France 1277238080.jpgAnatole France  La rôtisserie de la reine Pédauque  Bibliothèque Lattès